Les femmes que l’on rencontre dans ce recueil de nouvelles sont des femmes fortes, des battantes, qui lorsque le sort les jette à terre, se servent du sol comme un tremplin pour ne pas seulement se relever mais pour se dépasser.
Moderne, « Autour de ton cou » est un ouvrage dans lequel les histoires se passent à notre époque et évoque tout ce qu’elle recèle de subversif. Sans langue de bois, Chimamanda Ngozi Adichie aborde bon nombre de problèmes qui minent nos sociétés Africaines: la corruption, les conflits ethniques et religieux, la dictature, l’intolérance … Du Nigéria aux Etats-Unis elle dissèque sous toutes leurs coutures la vie des femmes Africaines et les problèmes auxquels elles sont confrontées.
Naitre femme en Afrique, c’est voir le jour avec déjà une bataille à mener celle contre les préjugés qui vous enferment dans une case à cause de votre sexe et vous relègue à un rang inférieur à celui d’un homme.
Voilà d’emblée ce que m’inspire l’ensemble de son oeuvre qui vient corroborer une pensée qui m’est propre. Mais dans son oeuvre, si les femmes sont souvent victimes, elles ne se comportent pas comme telles. Elles s’affirment et font de leurs faiblesses une force même quand elles font le choix de garder leurs blessures muettes pour ne pas marchander une part de leur intimité contre la promesse d’une vie meilleure. Les femmes chez Chimamanda N.A sont dignes et fières et elles puisent en elles les ressources nécessaires à leur propre reconstruction. Que des hommes de main à la botte du gouvernement aient tué son fils à la suite d’un article écrit par son époux journaliste et qu’elle se retrouve seule dans un pays en proie à une guerre civile ou qu’elle ait été victime de viol à plus de 5000 kilomètres de chez elle et qu’elle se retrouve sans personne vers qui se tourner, la femme réussit toujours à renverser son destin tragique en un espoir lumineux.
Il nous est dressé dans ce livre des portraits différents, car toutes les femmes sont différentes mais elles sont unies par la résilience, la capacité qu’elles ont de se reconstruire. Ce sont des immigrées aux Etats-Unis, par choix ou pour suivre un époux basé là, des étudiantes en vacances dans une ville du Nigéria où des femmes qui habitent tout simplement à Lagos. Peu importe qui elles sont, elles effectuent toutes un voyage en elles-mêmes. Elles analysent leurs sentiments pour ne pas subir mais réagir. Ce qui les afflige se mêle à une réflexion profonde qui se meut ensuite en action. On décèle ainsi une certaine fragilité et une ténacité qui caractérise toute l’ambivalence de la femme.
Les réactions sont souvent inattendues voire parfois radicales. Comme dans la nouvelle « Demain est trop loin » où par jalousie à l’égard de son frère Nonso, une petite fille décide fomenter un plan qui causera sa mort. Mais peut-être faut-il regarder la mort de Nonso comme le reflet de celle que subissait intérieurement sa soeur? Peut-être est-ce une métaphore de la perte de l’estime qu’elle avait pour elle, de sa propre mort intérieur qu’elle sentait venir, causée par l’attitude de parents qui l’ignorait presque car seul Nonso existait à leurs yeux. Aussi, elle préfère par un geste malheureux mais salvateur pour elle, de supprimer celui qui lui fait de l’ombre. Dès le plus jeune âge on voit donc que la femme est confrontée à une dévalorisation de sa personne. Sa grand-mère l’incite à regarder comment elle prend soin de son frère pour que plus tard elle sache choyer son mari, mais qui pendant ce temps prend soin d’elle?
Les personnages masculins que l’on rencontre dans cet ouvrage ne sont pas tous des caricatures du genre masculin. On y trouve de braves hommes, et même un époux qui renverse les rôles, si tant est qu’il y ait des rôles préétablis entre hommes et femmes, en travaillant puis s’occupant de son fils pendant que sa femme se livre à sa passion.
Avec Chimamanda N.A, les clichés ne tiennent pas. Il suffit d’un pas vers l’autre, du dialogue pour faire tomber les préjugés. Où que l’histoire se situe, il y a un choc des cultures. Dans « Les marieuses », l’héroïne est invitée par son époux à se débarrasser de sa culture pour adopter les habitudes américaines comme si les deux étaient incompatibles. Dans « Une expérience intime » deux femmes en apparence aux antipodes se rapprochent. La première ibo chrétienne issue d’une famille aisée, la seconde haoussa, musulmane et d’origine pauvre. Les différences sont exacerbées et pourtant à chaque fois c’est du rapprochement de deux femmes qui semblent en tous points contraires que jaillit l’espoir. L’autre n’est en soi pas si différent de nous, il est possible de se comprendre si on prend la peine d’ôter nos oeillères. De même la femme n’est pas l’opposé mais lui est complémentaire. La femme est un homme comme les autres!
Une réflexion sur “Autour de ton cou, Chimamanda Ngozi Adichie”
Une revue qui donne vraiment envie de lire. Je n’ai pas encore eu le bonheur de lire cette femme d’exception. Je viens de gagner une raison supplémentaire de le faire.
Une revue qui donne vraiment envie de lire. Je n’ai pas encore eu le bonheur de lire cette femme d’exception. Je viens de gagner une raison supplémentaire de le faire.